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Génétique des populations à l'échelle du génome et surveillance moléculaire de la résistance aux insecticides chez les moustiques Anopheles à Sebatkilo, Awash, Éthiopie

Depuis sa découverte à Djibouti en 2012, le moustique asiatique Anopheles stephensi s'est propagé dans toute la Corne de l'Afrique. Ce vecteur invasif continue de se propager sur le continent, constituant une menace sérieuse pour les programmes de lutte antipaludique. Les méthodes de lutte antivectorielle, notamment les moustiquaires imprégnées d'insecticide et la pulvérisation intradomiciliaire d'insecticide à effet rémanent, ont considérablement réduit la charge du paludisme. Cependant, la prévalence croissante de moustiques résistants aux insecticides, notamment les populations d'Anopheles stephensi, entrave les efforts d'élimination du paludisme en cours. Comprendre la structure des populations, les flux génétiques entre les populations et la distribution des mutations de résistance aux insecticides est essentiel pour orienter des stratégies efficaces de lutte antipaludique.
Il est essentiel de mieux comprendre comment An. stephensi s'est implanté dans la HOA afin de prédire sa propagation potentielle à de nouvelles zones. La génétique des populations a été largement utilisée pour étudier les espèces vectrices afin de mieux comprendre la structure de la population, la sélection en cours et le flux génétique18,19. Pour An. stephensi, l'étude de la structure de la population et du génome peut aider à élucider sa voie d'invasion et toute évolution adaptative ayant pu se produire depuis son émergence. Outre le flux génétique, la sélection est particulièrement importante car elle permet d'identifier les allèles associés à la résistance aux insecticides et de comprendre comment ces allèles se propagent au sein de la population20.
À ce jour, les tests de marqueurs de résistance aux insecticides et de génétique des populations chez l'espèce invasive Anopheles stephensi se sont limités à quelques gènes candidats. L'émergence de l'espèce en Afrique n'est pas entièrement comprise, mais une hypothèse est qu'elle a été introduite par l'homme ou le bétail. D'autres théories incluent une migration longue distance par le vent. Les isolats éthiopiens utilisés dans cette étude ont été collectés à Awash Sebat Kilo, une ville située à 200 km à l'est d'Addis-Abeba et sur le principal couloir de transport entre Addis-Abeba et Djibouti. Awash Sebat Kilo est une zone de forte transmission du paludisme et abrite une importante population d'Anopheles stephensi, qui serait résistante aux insecticides, ce qui en fait un site important pour l'étude de la génétique des populations d'Anopheles stephensi8.
Français La mutation de résistance aux insecticides kdr L1014F a été détectée à faible fréquence dans la population éthiopienne et n'a pas été détectée dans les échantillons de terrain indiens. Cette mutation kdr confère une résistance aux pyréthroïdes et au DDT et a été précédemment détectée dans des populations d'An. stephensi collectées en Inde en 2016 et en Afghanistan en 2018.31,32 Malgré les preuves d'une résistance généralisée aux pyréthroïdes dans les deux villes, la mutation kdr L1014F n'a pas été détectée dans les populations de Mangalore et de Bangalore analysées ici. La faible proportion d'isolats éthiopiens porteurs de ce SNP qui étaient hétérozygotes suggère que la mutation est apparue récemment dans cette population. Ceci est soutenu par une étude précédente à Awash qui n'a trouvé aucune preuve de la mutation kdr dans les échantillons collectés au cours de l'année précédant ceux analysés ici.18 Nous avons précédemment identifié cette mutation kdr L1014F à faible fréquence dans un ensemble d'échantillons provenant de la même région/année en utilisant une approche de détection d'amplicon.28 Étant donné la résistance phénotypique sur les sites d'échantillonnage, la faible fréquence allélique de ce marqueur de résistance suggère que des mécanismes autres que la modification du site cible sont responsables de ce phénotype observé.
Une limite de cette étude est le manque de données phénotypiques sur la réponse aux insecticides. D'autres études combinant le séquençage du génome entier (WGS) ou le séquençage ciblé d'amplicons, en association avec des bio-essais de sensibilité, sont nécessaires pour étudier l'impact de ces mutations sur la réponse aux insecticides. Ces nouveaux SNP faux-sens, potentiellement associés à la résistance, devraient être ciblés par des tests moléculaires à haut débit afin de soutenir la surveillance et de faciliter les travaux fonctionnels visant à comprendre et valider les mécanismes potentiels associés aux phénotypes de résistance.
En résumé, cette étude permet de mieux comprendre la génétique des populations de moustiques anophèles sur plusieurs continents. L'application du séquençage du génome entier (SGE) à de plus grandes cohortes d'échantillons dans différentes régions géographiques sera essentielle pour comprendre le flux génétique et identifier les marqueurs de résistance aux insecticides. Ces connaissances permettront aux autorités de santé publique de prendre des décisions éclairées en matière de surveillance des vecteurs et d'utilisation des insecticides.
Nous avons utilisé deux approches pour détecter la variation du nombre de copies dans cet ensemble de données. Premièrement, nous avons utilisé une approche basée sur la couverture, axée sur les groupes de gènes CYP identifiés dans le génome (tableau supplémentaire S5). La couverture de l'échantillon a été calculée sur l'ensemble des sites de collecte et divisée en quatre groupes : Éthiopie, champs indiens, colonies indiennes et colonies pakistanaises. La couverture de chaque groupe a été normalisée par lissage par noyau, puis représentée graphiquement en fonction de la profondeur médiane de couverture du génome pour ce groupe.


Date de publication : 23 juin 2025